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La soirée Les Partisans du chant propose autant un retour aux sources qu’un renouveau de la « chanson française » que d’aucuns jugent trop vite poussiéreuse. Une invitation à la créativité poétique et à la magie musicale, aux mots qui sonnent et aux sons qui remuent, aux textes qui dérangent et aux tempos qui démangent. L’édition 2017 sera bigarrée et rebondira de la sauvagerie primitive à la subtilité mature, de l’orchestration tribale à la dextérité textuelle.
Délaissant un moment ses nombreux projets collectifs (Orchestra Vivo!, Klezmic Zirkus…), l’ardente clarinettiste et la talentueuse compositrice, Aurélie Charneux, enfante intégralement – musique, texte, concept – son premier projet personnel : La mère de nos mères, inspirée par Lucy, la première femme, l’essence de l’humanité, la mère universelle. Elle ramène à la nature primitive autant qu’elle bouscule ses contemporaines et interpelle la femme future, non sans une pointe de cynisme. Ses allers-retours temporels et ses différentes facettes sont chantées, récitées, slamées, criées sur des musiques venant de contrées lointaines, dans un climat fougueux, vibrant et organique. Tout en simplicité… volontaire. Du son, du vent, du bois, du roseau, des mains qui rythment le temps qui perd la tête. Du sens, souvent multiple, des sens alertes et allègres qui soufflent des rêves.
Viscéralement indépendant, artisan intègre et prolixe, Batlik mène avec une rare persévérance son chemin loin des autoroutes. Militant anti-industriel du disque, il n’en est pas moins (auto)productif et enregistre sous son propre label un album par an. XI lieux, le onzième, propose onze tableaux qui évoquent chacun un endroit plus ou moins matériel. Lucide face à ses paradoxes et ses décalages, l’autodérision se retrouve aussi bien dans son parcours que dans ses chansons racées et soignées, espiègles et mélancoliques. Comme sa plume bouge sans cesse, l’écriture s’est resserrée au fil de l’œuvre, progressant du plaidoyer à la poésie. Désormais tout en subtilité, dans les mots associés et dictés, la musicalité dense et matinée, le phrasé syncopé et la voix caressante au timbre unique. Les thèmes aussi ont muri tout en maintenant un fil conducteur : le désenchantement, la ponctuation du malheur et la ponctualité de la riposte. Et puis la subtilité contre la barbarie.
Artiste multiforme, virevoltant et hyperactif, Kacem Wapalek se balade au gré de ses envies aux confluences du slam, du rap et de la chanson, avec quelques influences jazz, raï et reggae. Sa verve gouailleuse allie la plume, la rime et le flow avec l’humour, la contestation et la poésie. Son écriture est aussi ludique, oulipienne, que son imagination est fertile et son propos en prise sur l’époque corrompue. Jonglant avec les sonorités et les sens dissimulés qu’il aligne à la mitraillette, il s’est fait champion toutes catégories des allitérations, assonances, paronomases, antanaclases et autres contrepèteries. Sur scène, son énergie est aussi imprévisible que communicative. Il délivre sa prestation d’une manière courtoise mais complexe, attachante et touchante avec toujours un fond de vérité astucieux dans un ensemble délirant.